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Quand le paiement de la pension alimentaire entraîne des difficultés...



Lors d’une séparation, les pensions alimentaires pour enfants sont normalement établies en considération des revenus des parents et de la période où ils ont les enfants sous leur garde. Plus on passe du temps avec l’enfant, moins le montant de la pension alimentaire à débourser est élevé. Ainsi, si le parent qui gagne le revenu le moins élevé est aussi celui qui a la garde la majorité du temps, le montant de la pension alimentaire peut augmenter plutôt rapidement. Or, bien que leurs revenus indiquent le contraire, certaines personnes n’ont parfois pas la capacité financière pour débourser de tel montants. Si tel est le cas, il est possible d’invoquer des difficultés simples ou excessives afin d’alléger ce fardeau financier puisque les juges ont un pouvoir discrétionnaire afin de déroger au barème habituel de fixation des pensions alimentaires.


En effet, c'est ce que permettent les alinéas deux et trois de l’article 587.2 du Code civil du Québec qui se lisent comme suit :


« 587.2. Les aliments exigibles d'un parent pour son enfant sont équivalents à sa part de la contribution alimentaire parentale de base, augmentée, le cas échéant, pour tenir compte des frais relatifs à l'enfant.


La valeur de ces aliments peut toutefois être augmentée ou réduite par le tribunal si la valeur des actifs d'un parent ou l'importance des ressources dont dispose l'enfant le justifie ou encore en considération, le cas échéant, des obligations alimentaires qu'a l'un ou l'autre des parents à l'égard d'enfants qui ne sont pas visés par la demande, si le tribunal estime que ces obligations entraînent pour eux des difficultés.


Le tribunal peut également augmenter ou réduire la valeur de ces aliments s'il estime que son maintien entraînerait, pour l'un ou l'autre des parents, des difficultés excessives dans les circonstances ; ces difficultés peuvent résulter, entre autres, de frais liés à l'exercice de droits de visite à l'égard de l'enfant, d'obligations alimentaires assumées à l'endroit d'autres personnes que des enfants ou, encore, de dettes raisonnablement contractées pour des besoins familiaux »


Les difficultés nommées à l’alinéa deux sont celles dites « simples ». Le fardeau à remplir afin de pouvoir les invoquer est beaucoup moins lourd que celui des difficultés « excessives ». Ainsi, il est permis d’invoquer les actifs d’un parent afin d’augmenter ou diminuer une pension alimentaire. Par exemple, si un parent a un revenu plutôt bas, mais qu’il possède beaucoup d’actifs, la pension alimentaire qu’il devra débourser pourrait en être augmentée.


Il est également possible d’invoquer les actifs et revenus de l’enfant dans certains cas. En effet, si l’enfant travaille ou possède d’autres sources de revenus, il est possible de le prendre en considération afin d’établir le montant de la pension alimentaire en attribuant une part de responsabilité à l’enfant pour qu’il réponde en partie à ses propres besoins.


Finalement, un parent dont les enfants sont nés de différentes unions pourra opposer le paiement d’une pension alimentaire pour un autre enfant afin que cela soit pris en compte dans le calcul de la pension. En effet, comme lorsqu’un parent a deux enfants d’une même union, le calcul de la pension alimentaire est basé sur les deux enfants, il est possible de faire de même lorsque ces enfants n’ont pas la même mère ou le même père. Par exemple, en 2021, lorsque les parents ont un revenu disponible de 30 001 $ à 32 000 $, le montant alloué pour un seul enfant est de 5 690 $ alors que pour deux enfants, ce montant est de 8 630 $, soit 4 315 $ par enfant. Ainsi, plus les enfants sont nombreux, plus le montant alloué par enfant diminue. Toutefois, cette variante n’est pas prise en considération normalement lorsque les enfants proviennent de plusieurs unions. C’est pourquoi il faut invoquer le paiement de pension alimentaire pour les autres enfants afin de faire appliquer ce principe. Toutefois, une mise en garde est de mise puisque la jurisprudence a établi que « chaque cas en sera un d'espèce et avant de moduler la valeur des aliments, le tribunal devra s'assurer que la solution retenue ne causera pas une situation inéquitable pour l'un ou l'autre des enfants des parties. »[1].


Les difficultés de l’alinéa trois sont « excessives » et celles qui y sont énumérées ne sont pas limitatives. Cela signifie donc que même si la difficulté n’est pas nommée spécifiquement dans l’article, rien n’empêche de tenter de l’invoquer malgré tout si cela cause de grandes difficultés au débiteur de la pension. Les plus communément invoquées sont toutefois celles présentées dans l’article, la première étant les frais reliés à l'exercice du droit d'accès de l'enfant. Cette difficulté permet de diminuer le montant de la pension alimentaire lorsque les dépenses reliées à l’exercice des contacts sont très élevées. Ce sera le cas lorsque l’enfant habite loin et qu’il en coûte cher au parent de se rendre auprès de son enfant, soit en raison du coût de l’essence ou parce qu’il doit débourser pour des billets d’avion.


Il est également possible d’invoquer d’autres obligations alimentaires dues à d’autres personnes que ses enfants. Il n’est toutefois possible de l’alléguer que lorsqu’il ces sommes sont dues à un parent, un époux séparé de corps ou un ex-époux. Ainsi, lorsque le parent doit une pension à son ex-époux et à l’enfant issu de cette union, le paiement de la pension alimentaire à l’ex-époux pourra être considéré. La priorité est toutefois clairement établie en faveur de l’enfant.


Enfin, le parent qui a dépensé d’importantes sommes et contracté des dettes pour le bien de la famille pourrait également se voir attribuer une pension alimentaire moins élevée afin de compenser ces dépenses. Toutefois, ces dépenses devront être raisonnables eu égard aux circonstances et avoir été contractées pour les besoins de la famille. Ainsi, les tribunaux ont, par le passé, accordé de l’importance aux dettes d’études ou aux dettes nées de paiements de la résidence familiale.


[1] Sylvie Harvey, « L'obligation alimentaire » dans École du Barreau du Québec, Droit de la famille, Collection de droit 2021-2022, vol. 4, Montréal (Qc), Éditions Yvon Blais, 2021, 165, p.235

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